On jouait déjà avant ta naissance, donc on a raison

Genre: Chauve-souris Homme • Editeur: Warner Brothers Games • Date de sortie: Octobre 2013

Batman: Arkham Origins

Par • le 4/12/2013 • À la une, PC, PlayStation 3, Tests & previews, Wii U, Xbox 360 • Exemplaire du jeu payé avec nos sous •

Ayant créé la surprise avec Batman: Arkham Asylum puis confirmé l’essai avec Batman: Arkham City les braves du studio anglais de RockSteady ont passé la main à Warner Games Montréal pour ce nouvel épisode, intitulé Batman: Arkham Origins.

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Baston dans la neige

Voici plusieurs mois que des rumeurs circulent au sein de la pègre de Gotham : un étrange monstre ressemblant à une chauve-souris humanoïde décimerait les rangs des criminels. La police, menée par le crapuleux commissaire Loeb, se refuse à tout commentaire mais dans une ville corrompue jusqu’à la moëlle, le travail de l’honnête inspecteur Gordon se révèle ardu : entre les différentes familles mafieuses se disputant le contrôle de Gotham et une armada de criminels tous plus cinglés les uns que les autres, la nuit de Noël ne sera pas de tout repos… D’autant plus qu’une évasion est en cours au pénitencier de Blackgate. C’est au milieu de ce cocktail explosif que débarque Bruce Wayne, dans un costume encore peu raffiné de Chevalier Noir. Rembourrages, coudières, protections tenant plus d’un membre du SWAT que d’un héros en collants, le côté « brut » de cette armure confirme que l’on observe les premières ébauches de ce qui deviendra par la suite un costume reconnu et craint. Le tempérament du riche héritier est au diapason : sourd aux conseils du fidèle Alfred Pennyworth, brutal et un poil arrogant, ce Batman cogne d’abord et interroge ensuite, n’hésite pas à balancer dans le vide – mais dans un sapin de Noël tout de même – l’un des hommes de main du Pingouin. Pas de temps pour la subtilité : avec une prime de cinquante millions de dollars sur sa tête financée par Black Mask, la bête se sait traquée par au moins huit chasseurs, sans compter la totalité du SWAT qui espère bien palper la récompense, dans une ville de Gotham désertée par ses habitants suite au couvre-feu imposé par la Police.

I mistook me for somebody else

La croisière se marre

En présentant immédiatement la galerie d’ennemis à venir, Arkham Origins prend une orientation différente de son prédécesseur immédiat qui distillait les personnages petit à petit, mais celà n’empêche pas le titre d’avoir quelques surprises à son casting. Il y aura certes de la redite, mais le design joue plutôt bien du côté prequel du titre en respectant parfaitement les jalons posés par les jeux de RockSteady. Idem du point de vue de l’histoire qui s’y inscrit sans trop de difficultés malgré quelques faiblesses et incohérences (notamment Batman balançant le prénom d’Alfred lors de communications radio, juste devant des criminels). L’univers contient évidemment son lot de fanservice qui, s’il n’est pas aussi pléthorique que dans City, recèle des surprises plus que réjouissantes pour les amateurs avertis. On saluera notamment la qualité de l’écriture du passage du Red Hood, pour déplorer la faiblesse de celui du Mad Hatter qui singe sans jamais l’égaler l’incroyable séquence du Scarecrow d’Asylum. Pour ce qui est du déroulement du jeu, la structure est strictement identique à City : Batman se balade à son gré au sein de Gotham, dont toutes les zones sont immédiatement accessibles dès le début. Certains immeubles sont reconnaissables dans Old Gotham puisqu’ils sont similaires à ceux de City mais ils représentent une infîme minorité et les gens qui racontent à qui veut bien les entendre que la map est une repompe sont des idiots. Petite nouveauté, un fast travel est déblocable en libérant les tours de communication piratées par Enigma. La progression, elle, se fera en pénétrant dans différents immeubles plus ou moins linéaires – plutôt plus que moins – et en en défaisant les occupants. Lors de l’exploration libre de la ville, des événements aléatoires peuvent se produire comme un appel de détresse de la police, l’apparition sur la carte de l’emplacement d’un crime non résolu à investiguer, et une pelletée d’autres objectifs secondaires (défis d’Enigma, produits toxiques de Black Mask à détruire, relais de communication du Pingouin). Le moins que l’on puisse dire, c’est que les objectifs secondaires ne manquent pas, à tel point que l’on se retrouve vite perdu, même après avoir saigné City, sous ce déluge d’informations diverses. Les bugs non plus : lors des premières semaines après la sortie du jeu, il n’était pas rare de se retrouver bloqué dans une tour ou bien tout simplement de ne plus pouvoir progresser parce qu’une mission ne démarrait pas. Si ces soucis ont été par la suite corrigés, il en demeure un essentiel qui risquera de gâcher le plaisir des amateurs de succès ou de complétion à 100%.

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Fou du chapeau

S’il existe bien un truc idiot pour tout complétiste, il s’agit des missable, ces objectifs qui, passé un certain temps de jeu ou un certain checkpoint, sont impossibles à accomplir. Arkham Origins en est bourré. Avant tout à cause de ces achievements idiots « battez tel boss sans prendre un seul dégat », sachant qu’une fois le boss vaincu on ne l’affrontera ensuite plus jamais. Mais surtout, et c’est bien plus grave, parce que la simple progression du personnage se retrouve handicapée par un game design bancal : peu équipé au début du jeu, Batman débloque par la suite une multitude de gadgets mais également d’aptitudes au combat par le biais des déjà connus Waynetech Upgrades. Certains d’entre eux ne s’obtiennent qu’en accomplissant des objectifs précis, nommés Dark Knight. Si ceux liés à l’exploration, au vol aérien et à la baston à mains nues sont aisés à obtenir, il n’en est pas du tout de même de ceux liés aux défis prédateur et le joueur averti aura tout intérêt à essayer de les accomplir le plus vite possible, sous couvert de se retrouver tout simplement dans l’impossibilité de le faire, et ce pour des raisons purement mathématiques : il y a quinze défis prédateur à accomplir. J’ai beau recompter dans ma tête, je ne me souviens pas de quinze salles prédateur dans le jeu. Alors certes, certains défis prédateur peuvent se faire en extérieur, mais cela pose tout de même un problème pour une raison simple : à l’inverse de City, une fois une salle prédateur vidée, les ennemis n’y réapparaissent jamais et les challenges prédateur ne comptent pas pour réaliser les objectifs Dark Knight. Ayant commencé ma partie directement en Hard, ayant compris le principe de ces objectifs au bout de plusieures heures de jeu et malgré un second run à 100% en New Game +, je n’ai toujours pas réussi à compléter la moitié des objectifs Dark Knight prédateur. Et j’ai la haine.

Where does he get those wonderful toys?

On se marre à Blackgate

Ces problèmes sont d’autant plus malheureux que le reste du titre, s’il s’appuie toutefois essentiellement sur des mécaniques de jeu introduites par son prédecesseur, est relativement solide. Bien évidemment, il n’y a ici aucun bouleversement de l’envergure de la transition entre Asylum et City et la sensation d’être sur une simple extension vendue plein pot est parfois un peu présente. En effet, si la map est quasi entièrement nouvelle, si les intérieurs des buildings sont inédits, si l’arsenal de Batman herite de nouveaux équipements (telle la griffe de Deathstroke permettant de réellement s’amuser durant les défis prédateur) et le bestiaire de quelques nouveaux ennemis sympa, Origins est similaire dans sa conception et son gameplay à City et les fans de la série devraient retrouver leurs marques et y prendre du plaisir. L’introduction de passages d’enquête, certes un peu ratés et peut-être un peu pompés sur Remember Me, montre une volonté d’essayer d’innover quelque part. Il me paraît donc malvenu de reprocher à Warner Montréal de faire sur un titre ce que fait Ubisoft avec Assassin’s Creed depuis six ans. Arkham Origins a des défauts, certes, mais il est loin d’être l’infâme daube décrite par certains, et malgré certains errements son écriture se révèle bien plus fine et maline qu’au premier abord. Sur PC avec DirectX11 et PhysX activés, certains passages flattent la rétine, sans parler des bastons sur les toits dans la neige laissant des traces persistantes, très agréables à l’œil. Pour un fan de la série, la question d’y consacrer quelques heures ne se pose même pas. Pour n’importe qui d’autre, le jeu est déjà trouvable à bas prix et n’a rien de honteux.

Quelques mots sur le multijoueur : développé par Splash Damage (les gus derrière Brink), le mode online met en scène deux factions s’affrontant pour le contrôle d’un territoire : les hommes de main du Joker face aux mercenaires de Bane. Si jouer un simple truand n’est guère excitant, la possibilité de voir le Bane ou le Joker themselves rejoindre la partie en cours de match amène déjà quelques perspectives sympathiques. Mais ce qui différencie ce titre de la légion de TPS multi déjà disponibles sur le marché, c’est la présence de Batman et Robin qui vont tenter de mettre des bâtons dans les roues à tout ce petit monde. Usant de leur arsenal habituel, ils disposent d’une plus grande mobilité pour surprendre leurs adversaires et les mettre hors d’état de nuire le plus furtivement possible : une rafale dans le buffet et les héros tombent. Hardcore pour les débutants, jouer un héros donne un réel sentiment de puissance une fois les divers gadgets parfaitement maîtrisés et ce sont rapidement les sbires et les mercenaires qui deviennent des proies. S’il serait idiot d’acheter le jeu uniquement pour son multi, celui-ci est une expérience agréable qui permet de se changer les idées entre deux modes challenge, même s’il est déjà difficile d’y trouver du monde, tout juste un mois après sa sortie…

Plein de bonne volonté mais perclus de bugs, pas si mal écrit mais englué dans une mythologie pas totalement maîtrisée, riche en contenu mais au game design complètement pété, Arkham Origins est victime de ses ambitions mais aussi de son hérédité. Nul doute que le titre aurait été salué si Asylum et City n'étaient pas passés par là. Nul doute également que sans ces éléments fondateurs, il n'aurait certainement pas eu le même éclat. Un jeu honnête mais sans génie, malgré quelques fulgurances : on est loin de la daube, mais pas près du chef-d'œuvre non plus.

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est joueur depuis 1985. Multiplateformes, multigenres, souvent exigeant, parfois tatillon, mais jamais blasé.
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Un commentaire »

  1. Là où t’as totalement raison, c’est qu’il morfle pas mal de la bonne qualité de son prédécesseur. Néanmoins, c’est un titre exquis à mon goût qui souffre de 2 défauts:
    ->bugs de fous qui empêchent même de terminer le jeu à 100% (sur PC en tout cas, j’ai carrément une mission secondaire qui a planté et que je ne peux pas terminer…)
    ->réalisation qui commence à faire pitié car elle se traîne les limites de la PS3 et de la 360. Le prochain Batman commencera peut être ressembler à ce que j’attends.

    Pour le reste: scenar, variété des missions secondaires, présentation des supervilains rajeunis, batcave… C’est tout bon.

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